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Nage avec un orignal

Dernière mise à jour : 16 sept. 2020

Voici des images qui représentent la réalisation d’un de mes grands rêves. Ça fera maintenant 24h que j’ai vécu ce moment et j’ai encore des papillons dans le ventre. Oufff par où commencer….


Il y a 3 jours, mon ami Ludwig et moi avons exploré un lac en altitude des Chic-Chocs dans l’espoir d’y faire de possibles rencontres avec les Rois des forêts dans les environs de ce lac. J’avais dit à Ludwig à quel point je suis en amour avec ces cervidés et que j’adorerais les voir en action dans un lac de chez nous en Gaspésie. Je lui avais dit que l’un de mes rêves était de partager un moment dans l’eau avec eux. Un moment où je pourrais échanger le moment d’une vie à la nage avec un orignal. Malgré les efforts, la discipline, la persévérance et le temps passé sur le terrain, nous revenions bredouille. Mais en réalité, on n'est jamais vraiment bredouille. J’apprenais sur le comportement des orignaux dans ce genre de milieu en observant leurs nouvelles traces jour après jour. 🌲


C’est hier soir que la magie s’est opérée. En arrivant sur place, je me sens bien. J’ai un bon « vibe ». Je suis positif, j’ai une bonne attitude et j’ai cette petite voix qui me dit à l’oreille que j’ai le droit de me faire quelques attentes et que j’aurai le privilège d’observer des orignaux dans l’eau cristalline des Chic-Chocs. Comme à l’habitude, je lui fais confiance et j’embarque dans mon kayak les yeux grands grands ouverts.


À ce moment, on a accumulé un 9h de sommeil en 72h. On est fatigué, mais on tenait à arriver plus tôt qu’à l’habitude pour maximiser nos opportunités d’observations. Ludwig embarque sur l’eau également et on prend chacun nos directions. Il fait assez froid et il vente beaucoup. Quelques arcs-en-ciel font leur apparition dû au temps qui est très instable, passant de la pluie battante au soleil en quelques minutes. À ce moment-là, il est 16h00.


16h07 : Ça aura pris 7 minutes seulement avant que je fasse ma première observation. Je capotais ben raide. Je vois une belle femelle qui venait tout juste de sortir du bois. Elle était relax et marchait sur le bord du lac. J’en revenais pas qu’elle soit sortie juste-là devant mon kayak à une centaine de mètres sur un lac qui fait plus de 6km de circonférence. Avant même de me concentrer à mon observation, je pense à ma petite voix qui, une fois de plus, m’avait guidé vers la magie. Je prends donc mon temps et réalise quelques photos d’elle. Je suis vraiment très très heureux de ma rencontre parce qu’en 3 jours, je n’avais pas eu cette opportunité.


17h13 : Ludwig et moi sommes à l'affût sur un petit îlot du lac. La pluie battante recommence et je décide de faire un tour du lac. Un 6km qui devrait me prendre environ 1h30. Étonnamment, le vent se calme et la pluie tombe de plus en plus fort. Je termine mon tour du lac vers 18h45 sans aucune vie sauvage observée. Je rejoins donc mon ami sur le petit îlot.


18h50 : On avait pris le temps de s’amener un peu de bouffe et quelques bières dans l’éventualité où on aurait beaucoup d’affût à faire. Bon, ceux qui me connaissent un peu plus ne seront pas surpris de savoir que je n’ai pas bu une bière mais bel et bien une bonne Palm Bay ! On parle de tout et de rien à voix basse tout en scrutant minutieusement le lac aux jumelles dans l’espoir infini d’y voir un orignal dans l’eau. Puis, en sirotant ma Palm Bay, je vois une femelle orignal sortir du bois au-dessus de l’épaule de Ludwig. Je capote ben raide parce qu’elle n'est vraiment pas loin. Elle est à environ 120m de notre petit îlot.


19h09 : Elle marche dans l’eau de plus en plus profonde. J’ai le coeur saisi. La tête qui tourne. Ma respiration qui... je ne m’en souviens même pas en fait. Tout ça pour dire que plus elle marchait dans l’eau, plus je capotais. Quelques minutes plus tard, elle s’est mise la tête complètement sous l’eau pour aller s’alimenter au fond de l’eau. Elle restait submergée pendant plusieurs dizaines de secondes. C’était absolument incroyable d’avoir l’extrême privilège d’être témoin de cette scène sans le moindre dérangement. J’ai donc décidé d’aller dans l’eau jusqu’au nombril pour y faire des photos à quelques centimètres de l’eau (voir photos et vidéos).


19h20 : Ça ne faisait que 10 minutes que je la prenais en photo lorsqu’un étrange feeling a comme pris possession de mon corps. Je me sentais à la bonne place au bon moment. Je me sentais dans un calme et une sérénité que je n’avais jamais vécus auparavant. Je me sentais comme sur un nuage. Un peu comme si je flottais. Malgré la scène et la proximité incroyable que j’avais avec cette ravissante femelle orignal, je suis revenu sur le petit îlot. Ce que je sentais dans mon ventre et dans mon coeur était encore plus fort que mon amour pour la photographie animalière. J’ai pris mon appareil photo et je l’ai remis à mon ami en lui disant « Tiens moi ça svp. Je reviens. ».


19h26 : Je flotte sur mon nuage et je nage vers la femelle orignal. Il fait 15 degrés et l’eau est froide, mais je ne ressens ni froideur, ni peur, ni stress. Je ne sais pas combien de pieds d’eau j’ai sous moi, mais je nage parallèle à cette femelle qui continue de plonger sa tête sous l’eau en recherche de nourriture. Je ne pourrais décrire mon état d’âme à ce moment-là, mais… je vis un rêve. Je réalise un rêve et je ne veux pas que ça arrête. Je continue à nager, à la regarder. Lorsqu’elle sort la tête de l’eau avec sa nourriture, je ferme les yeux. Je l’entends mastiquer, je l’entends prendre son souffle, puis je l’entends replonger la tête sous l’eau. Le temps n’existe plus. La vie « normale » n’existe plus. Je vis en pleine conscience de chacune des secondes qui passent.



19h45 : Elle est toujours là en train de se nourrir. Je la remercie du plus profond de mon coeur et je reviens vers le petit îlot. Mon coeur est rempli d’amour et de gratitude. Je shake de froid bien sûr, mais c’est rien. Tous les sacrifices valaient ce moment. J’ai les larmes aux yeux.


20h05 : Je m’habille et remet mon kayak à l’eau pour aller l’observer à nouveau. Je prends une vingtaine de photos au maximum, mais ma tête n’était plus là. Elle était encore dans l’eau en flottaison avec elle. Elle a finalement quitté le lac à 20h20.


J’ai repris un peu conscience sur mon kayak vers 20h20 en pleurant. C’était des belles larmes accompagnées de beaux papillons dans le ventre et de mon coeur serré fort fort en-dedans. Même au moment où j’écris ces lignes… ça recommence… Merci la vie et merci à cette citoyenne qui, sans le savoir, a fait un homme marqué à jamais et en éternel amour avec ces cervidés.

Merci merci et merci Nature 💚


Et merci énormément à mon ami Ludwig d'avoir saisi ce moment. Ça a été une belle surprise de voir toutes ces photos par la suite.


Éric D


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